Quel sens donnons-nous à la médecine et à la chirurgie esthétique ? Est-ce celui de la vertu (la guérison) ou celui de la perversion (mutilation à des fins commerciales) ?
La tyrannie du paraître règne. Le diktat de la mode et ses apparences triomphent. Ce monde voit une pandémie contagieuse toucher des individus fragilisés par un manque d’estime et d’affirmation de soi. Le fantasme de la transformation du corps est réel et avec lui le souhait de posséder le pouvoir de maitriser le passage du temps sur notre corps.
L’identité collective a laissé place à l’identité individuelle (pyramide de Maslow). Cette recherche d’identité collective correspondait à des racines et des traditions fortes qui ancraient l’individu dans une reconnaissance forte, une existence réelle et une visibilité valorisante par des signes d’appartenance gratifiants. La quête de l’identité individuelle est difficile.
L’être humain a-t-il un besoin compulsif de construction ou de reconstruction identitaire ?
Qu’est ce que la recherche identitaire ? Une quête de dignité ? Une recherche d’un rôle social ?
Le sens ultime de la l’« Apparencothérapie » serait celui d’une dignité retrouvée qui fait qu’une personne peut affronter sans crainte son propre regard. Kant l’a bien montré : alors que la valeur se réduit au prix que peuvent avoir les choses que l’on acquière, la dignité se mesure au respect que l’on doit avoir pour les autres et pour soi-même. C’est à cette dignité humaine perdue que la chirurgie esthétique doit se confronter dans chacun de ses actes pour pouvoir à son tour la rétablir.
Qu’est ce que cette Identité (et donc cette dignité) recherchée?
Deux identités existent : l’être et le paraître.
L’être se construit au fil du temps, le paraitre est son habit de scène.
L’importance du paraître est légitime pendant la période plus ou moins longue de construction de l’être. Ensuite la prédominance du paraitre s’estompe au fil du temps, quand l’être reprend le dessus. C’est là que l’Apparencotherapie intervient en vue d’aider à la construction identitaire, à condition d’aller dans la bonne direction, inscrite dans le passé et le vécu de l’individu. Plus tard, l’Apparencotherapie peut intervenir en sens inverse, réajuster une enveloppe aux mesures d’un être fini et stable (reconstruction secondaire, et dignité).
A quel moment intervient la tyrannie de l’apparence ?
Elle peut survenir lorsque l’image de soi est dépréciée, difficile, lorsque son apparence provoque insatisfaction. La beauté est un désir, la jeunesse en est un autre. Le bien être encore un autre. Les désirs, les fantasmes et l’imaginaire existent. Par ailleurs, ce qui tyrannise, c’est la laideur. En cause : l’idéologie hédoniste (désir de beauté, désir de jeunesse, désir de bien-être ; estime de soi, image du corps, charisme…)
Médecins de l’apparence
Pour les médecins de l’apparence, le challenge est de comprendre et traiter un patient qui veut passer d’une apparence contestée à une apparence espérée, ce qui est pratiquement (concrètement) irréalisable. C’est une quête difficile et pourtant il s’agit d’un contrat moral essentiel.
Le seul critère de réussite de notre acte médical esthétique est la satisfaction du patient envers son image, ayant à l’esprit l’imaginaire qui l’anime, loin de l’idéalisation artistique.
La chirurgie du paraître est bien une chirurgie de l’âme avec son corollaire la reconstruction identitaire.
Le charisme est-il la quête suprême ? Est-ce une garantie de bonheur ?
Le charisme n’existe que par une composante dynamique émotionnelle. Le charisme statique n’existe pas. Le charisme est indépendant de l’âge et de la beauté, et prend racine dans l’entente parfaite entre l’être et le paraître. Il fait souvent l’unanimité, ne se discute pas, il est une évidence. Mais le charisme est-il inné ou acquis ? Peut-on le fabriquer ?
Nait-on charismatique ? Peut-on devenir charismatique ? Peut-être si l’estime de soi est potentialisée ? Mais peut-être que cela ne suffit pas…
La Maeutique(« accoucher les idées des hommes », Socrate).
Quel est le rôle de la médecine et de la chirurgie esthétique ? Le rôle du médecin doit avoir une démarche authentique et non commerciale. Il s’agit d’évaluer la demande espérée et imaginaire, et en fonction du résultat technique présumé, évaluer son impact positif vers une reconstruction identitaire.